Interview de Boris Cyrulnik. La grande librairie. France 5. Emission du 18 mars 2020. Neuropsychiatre. Auteur.
Les conseils de Boris Cyrulnik pour la situation de confinement pour laquelle personne ne nous avait préparés. c’est à dire une forme d’enfermement…
BC : le confinement est un mode de défense contre l’attaque. les virus, c’est une protection de notre vie et c’est une grave altération psychologique, parce que Nous « mammifères humains », on ne peut pas vivre sans autres, on a besoin d’un autre pour se sentir nous-même. On a besoin d’être stimulé par la rencontre, par le désaccord, par l’amour, par la haine, et si on n’est pas stimulé, notre cerveau s’éteint, nos émotions ne sont plus contrôlées et il y a un risque d’angoisses ou même, pour les prisonniers qui sont isolés pendant trop longtemps, ou dans les sous-marins quand il y a des situations de confinement trop longues, on voit apparaître des hallucinations chez les gens totalement équilibrés.
Donc le confinement qui est nécessaire est une grave altération psychologique.
Que faire pour s’y préparer et éviter que cette altération psychologique que vous décrivez parfaitement bien, ne soit maximale, Et y a-t-il des façons d’échapper à l’altération psychologique ?
la poésie joue un grand rôle, le mode intérieur joue un grand rôle, la littérature, la musique, les petits signes sont interprétés et à ce moment là, les activités : la musique, l’activité physique.
Les trois grands tranquillisants : l’action mais là on aura du mal (sauf peut-être le jogging, le vélo), l’attachement qui est notre vrai tranquillisant naturel parce que dès l’instant que quelqu’un d’autre nous sécurise, on peut affronter le réel et on peut affronter ce virus qui nous agresse. Et le 3ème, la création d’un monde de réflexion, mais le monde parlé exige une interaction, une rencontre alors que le monde écrit implique une plongée intérieure, les deux sont possiblement associés là, à ce moment-là, la littérature joue un rôle majeur.
Pour l’instant, on n’est pas dans la résilience, la définition est très simple : « c’est la reprise d’un nouveau développement après le traumatisme ». Or, actuellement on n’est pas dans la reconstruction, on est dans l’affrontement. Il faut se préserver, il faut téléphoner et parler, la parole est un excellent tranquillisant même par téléphone, il faut écrire pour retrouver l’ancien mode de communication. Deux facteurs sont dévoilés actuellement par cette catastrophe économique, écologique. C’est deux facteurs, c’est que notre culture était devenue une culture du sprint, qui déclenche les angoisses, et que les machines nous ont éloignés des contacts réels qui ont un effet sécurisant. On n’a jamais été aussi confortable sur le plan matériel, il n’y a jamais eu autant d’angoisse. L’OMS dit que le budget de la psychiatrie sera le 1er budget mondial. Les femmes ont jamais eu autant de bien être à développer les grossesses et des enfants, il n’y a jamais eu aussi peu de mortes en couche, jamais eu aussi peu de mortalité infantile, il n’y a jamais eu autant de dépressions post-partum et pre-partum. Là, quelque chose s’est déréglé et le virus nous oblige à penser aux nouvelles cultures. Là, on sera dans la résilience. Mais pour l’instant, il faut attendre que le virus soit mort pour qu’on se remettent à vivre.
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